Recevoir un email pour chaque nouvel article?

Loading

Machado Rico, La Chartreuse

Au centre hospitalier de La Chartreuse, à Dijon, dans son espace d’exposition, en plein coeur du grand parc, Machado Rico proposait en l’hiver 2016-17 « Terra » . (C’était bien sûr une organisation de l’association Itinéraire Singulier). Mardi, mercredi, samedi et dimanche 13h30-17h

J’ai appris (merci pour la visite guidée de l’exposition!) que l’expression « art singulier » qui a remplacé « art brut » vient du fait que les personnes qui sont ainsi étiquetées continuent à ne pas suivre les règles classiques, à faire oeuvre spontanée et à utiliser des matériaux rustiques et récupérés, mais qu’ils ne sont plus forcément enfermés dans un hôpital psychiatrique, une prison ou tout simplement dans leur campagne profonde. Autrefois, les oeuvres « brutes » (celles que collectionnait Dubuffet) étaient des créations de gens marginaux par la force des choses (maladie mentale, enfermement, éloignement), qui n’avaient pas de moyens, pas de connaissances, pas de culture, pas de rapports au monde etc. Aujourd’hui, on peut être « artiste singulier » même si on a fait des études aux Beaux Arts et qu’on vit la vie de tout le monde.

La frontière est difficile à cerner!

Machado Rico, elle, a fait des études d’art, elle s’est initiée au graphisme publicitaire, et à diverses techniques comme la tapisserie haute lice, la gravure, la laque. Elle a commencé dans le classique. Et puis, à 51 ans, elle est sortie du rang! Son art est devenu plus marginal. La peinture que l’on découvre ici (entre 1995 et 2010 environ) a ce goût pour les accumulations, pour la matière et la couleur exubérantes, pour le dessin naïf et enfantin, pour les mises en scène à plat sans recherche de perspective… que l’on voit souvent chez les artistes singuliers.RicoOn peut dire que les caractères que je viens de citer sont tout simplement son expression la plus impulsive. La plus instinctive.

On peut aussi dire qu’ils viennent de ses références et influences. En effet, d’une famille originaire d’Andalousie, Machado Rico est née à Oran. Elle a habité le Midi de la France et elle s’est expatriée avec son mari quelque temps au Canada. Donc, un peu de méditerranéen, un peu d’espagnol, un peu d’amérindien (cf ses totems)… Mais il y a, malgré tout, chez Machado Rico, un appétit personnel évident pour « faire joli » comme disent les enfants. Ses compositions sont habiles, mais chargées. Elle orne, elle colle, elle ajoute, elle empâte… Des gestes jouissifs. C’est plutôt sympa. Comme de l’art populaire, expressif, narratifRico2

Juste espérer que son style de peinture n’est pas devenu un « système » , qu’elle le répète à l’infini pour la bonne raison qu’elle le vend bien. Espérons.

Cliquez sur les visuels pour agrandir, en deux fois

Atelier du regard: nouveau!

J’ai essayé!

Premier « Atelier du regard » jeudi dernier, au Centre, rue de Chenôve, Dijon, mené par la plasticienne Christine Delbecq. « Ni un cours d’histoire de l’art ni un cours d’art plastique ni une visite guidée » dit-elle.

Elle avait apporté deux photos représentant des oeuvres d’artistes: Miquel Barcelo et Jiri Kolar. Tours de table. Les ressentis de chacun, les observations, les questions…Déjà les yeux s’ouvrent. De l’inattendu et de l’imprévu tombent. Passionnant.

Le principe de cet atelier est excellent.

Miquel Barcelo

Miquel Barcelo

D’abord, savoir s’arrêter devant une oeuvre d’art. Ne pas passer trop vite. Même si, à priori, elle nous indispose. Peu à peu entrer dedans. Grâce aux remarques du groupe, changer son regard. Sans pour autant se mettre forcément à aimer l’oeuvre en question. Mais s’y intéresser différemment. Oser se laisser déranger par elle. Commencer à mettre d’autres mots dessus. Aller plus loin.

La plasticienne conduit souplement le débat. Elle rassemble les commentaires entendus. Les fait rebondir et s’élargir. Elle apporte ses propres connaissances, fait part de ses expériences, tente de bousculer les idées reçues et les habitudes. Transmet spontanément son propre enthousiasme.

Conclusion: la prochaine visite à une exposition ou à un musée sera nettement moins casse-pieds pour ceux qui auraient assisté à cet atelier d’un nouveau genre! L’accès à l’art se fera plus facilement. Et, surtout, on aura compris que l’art … c’est pour nous. Nous tous. Qu’il peut nous emmener (ou ramener) vers nous-même.

Prochain Atelier du Regard le jeudi 12 janvier 2017, 20h30.

Viola Montenot, Galerie La Source

A Fontaine, à la Galerie La Source on s’est fait plaisir avec l’expo de  Viola Montenot à l’automne 2016: « Migrations ».

Viola4

C’est une exposition comme on les aime, avec une unité, un fil conducteur. Le titre en est la clé, « migrations ».  Dans sa vie, Viola Montenot a connu des migrations qui l’ont fortement marquée. L’artiste a fui son pays de naissance, la Slovaquie, en 1969. Réfugiée en France, elle est partie ensuite vivre en Polynésie. Puis, revenue en France, elle a revu la Slovaquie en 1990 et 1991. Des choses qui remuent…Surtout pour une âme sensible.Viola3

Mais, en fait, toute vie est « migrations ». La vôtre. La nôtre. Dans le sens où, comme elle le dit elle-même: »aucune chose n’est acquise. »  La condition humaine est faite de passages, de changements, d’incertitudes, de hasards et de mouvements perpétuels.Viola5

Dans les peintures de Viola Montenot, l’homme est un petit personnage en équilibre instable (funambule), plié et replié comme une feuille de papier, plutôt solitaire, perdu dans un dédale ou emprisonné.  Il cherche parfois à s’enfuir (s’envoler) ou à se cacher, pour échapper à l’absurdité de l’existence. Il peut aussi se réfugier dans son monde intérieur et ne devenir qu’un fantôme pour les autres (silhouette de dentelle à l’encre blanche)Viola

A bien observer les oeuvres présentées, on y retrouve toutes sortes de détails qui sont en rapport avec ces « migrations ». Les racines d’un arbre, au contraire du déracinement des exilés. Les poches en tissu, telles ces cachettes cousues dans la doublure des vêtements des migrants. Les pieds et les maisons qui sont la hantise de l’émigré, à la fois fuite et espoir d’un foyer retrouvé. Les tracasseries  de la paperasse bureaucratique angoissantes au plus haut point pour les immigrés. Etc.Viola2

Le travail de Viola Montenot « migre » aussi d’une matière et d’une technique à l’autre: bois, argile, drap de toile rustique, cagette, peinture, collage… Son origine slave se devine dans quelques images d’art populaire, sa vie en Polynésie l’a également beaucoup inspirée. Le vin et la vigne sont présents sous diverses formes aussi, car Slovaquie et Bourgogne sont des pays de vin. Sa passion pour l’art est évoquée par des images de la Renaissance.

Toute sa vie est là. Elle souhaiterait que le public voit cette exposition comme une valise, dont il sortirait un à un ses objets, ses souvenirs…

On peut aussi, tout simplement, visiter sans clés! Se laisser séduire par la beauté plastique de ses oeuvres. De toute façon, quelque chose d’autre passera!

Cliquer sur les visuels pour agrandir, en deux fois

 

 

13+ à l’Orangerie

« Jardin d’artiste et ses hôtes », titre de l’exposition du collectif 13+ à la Grande Orangerie du jardin de l’Arquebuse de Dijon. 25 artistes. En octobre 2016.

Il y a de quoi s’inquiéter quand on arrive à cette expo de l’Arquebuse et qu’on voit d’abord des branchages et des feuilles (déjà bien séchés)…Il suffit que le thème soit « jardin » et hop quelques végétations feront bien l’affaire. Quelques branches auxquelles on fait pendre je ne sais quels petits papiers, quelques faux arbres en pot donneront le « la » de cette expo… Et je te rajoute un brin d’herbe par-ci, un bouquet de persil par là…

Mais, passée cette impression de jardin d’enfant ou de kermesse paroissiale, on plonge dans les univers des artistes de 13+. Et on se fait plaisir plus d’une fois.

Certains ont bien joué le jeu et donnent à voir … Pas tous, malheureusement.

Comme d’habitude, je vais faire mon choix! Dire mes rencontres avec des choses touchantes, marquantes, nouvelles, étonnantes. Inspirées. Celles où j’ai discerné une créativité sensible.

Fabienne Adenis, a fait pousser d’étranges plantes dans ses petits pots de jardinage. Sûrement des graines de son pays d’Ondalia… Mi-humaines, mi-végétales. Ambiguïté. Beauté. Luxe et volupté. Et les feuilles d’automne qui jonchent le sol sont, chez elle, des visages féminins tout en or. Telles des médailles. L’artiste a également présenté ses phalènes en céramique blanche que j’avais tant aimé au cellier de Clairvaux. Piquées sur une sorte de buisson. Donc, pour F. Adenis, tout un ensemble de petites pièces qui foisonnent de vie (une autre vie.)FabienneAdenis

Edith Nicot a fabriqué son papier à partir de dizaines de plantes diverses et variées, et avec cette matière obtenue, incroyable, elle a façonné des mini kimonos (ses « l’uniques ») . Les voilà suspendus au-dessus d’un nid de guêpe géant (réel) qui montre le labeur fabuleux de ces petites bêtes qui construisent leur nid en papier. L’artiste a fait cueillette d’ail, d’artichaut, d’hortensia, de monnaie du pape, de coton etc. Elle a joué les sorcières dans ses marmites magiques. Et elle a ainsi créé de drôles de textures, très intéressantes, qu’elle met en volumes, en « sculptures ». A suivre!Edith4

Jean Philippe Jarlaud a accroché ses photos d’arbres. Magnifiques noirs et blancs, avec lignes élancées des fûts et personnages solitaires à leurs pieds. Beaux éclairages de coeur de forêt. On devine le lien étroit entre la nature et l’homme.

Odile Massart, la spécialiste de la gravure, donne à voir un travail subtil, avec, parfois, une pointe d’humour. De petits animaux dessinés à la plume, façon planche zoologique, ou gravés sur cuivre, ou sur zinc et aquarellés…OdileMassart

Avec Evelyne Lagnien, c’est le plaisir de voir des photos (je crois) grand format sur bâches: des silhouettes fondues (ou confondues) d’arbres et de visages, et, à leurs pieds, une installation de belles pièces de raku, comme des morceaux d’écorce. Décidément, dans cette expo, je préfère les créations des artistes, inspirées par la nature, aux choses de la nature elle-même!!

J’ai  stoppé aussi   -devant une image de nuées d’étourneaux dans le ciel, réinventée par la photographe Denise Guilloux qui a su utiliser le magnifique graphisme de ce vol d’oiseaux. Et, du coup, comment le réel passe une frontière…DeniseGuilloux

-devant deux peintures sur bois de Francis Orzel, sachant que cet artiste projette des pigments à l’aide d’une sorte d’aérographe. Jolie harmonie entre les arbres représentés et les veines du support naturel. Et le sujet, traité façon rêveur…Orzel

-devant des peintures de Jean Thirion qui racontent une histoire en couleur, avec quelques gros plans, quelques images arrêtées…Drôle et vivant.Thirion

-devant quelques terres cuites, celles d’ Odile Massart, celles d’Eliane Martinand, celles d’André Mugneret

Cliquer sur les visuels pour agrandir, en deux fois

 

 

 

le choix du mois, septembre 16, vidéo

J’ai vu en septembre 2016, une vidéo très intéressante réalisée par deux élèves des Beaux Arts de Dijon, Louise Crabières et Maxime Tibay. Elle était visible à l’exposition « Traces » au Cellier de Clairvaux.

Il s’agit d’une conversation entre deux personnes (un jeune couple d’amoureux?) dont les petites phrases apparaissent écrites en bas de l’écran, en sur-impression. Le genre de brefs messages qu’on s’envoie dans l’instant, pour garder un contact avec l’autre. Informations éclair, courts bavardages sans conséquences… Juste se suivre, ne pas se perdre, continuer d’être ensemble malgré la séparation.vidéo

Et des fragments de décors accompagnent ce dialogue. La table du bistro où elle prend un café en attendant de le retrouver; la voiture dans la rue; la plante verte, les fauteuils de l’appartement où elle l’attend; la cuisine… Mais les objets sont comme grignotés, déchiquetés et couverts d’une étrange matière blanche plus ou moins fondue. De plus, ces lieux évoqués flottent dans la nuit noire d’un espace sidéral. Notre regard circule dans ce cosmos bizarre. Un fil blanc relie chaque scène. Comme le lien qui réunit virtuellement les deux personnages.

Ma première impression fut celle d’un monde inquiétant et dérangeant. Un monde disparu, mort depuis longtemps. Qui tournerait en orbite quelque part dans l’univers. Et puis, j’ai pensé aux deux jeunes qui communiquent, à leurs visions très éphémères qui passent en même temps que leurs textes, à leurs bouffées de présence imaginée, à leurs messages qui voyagent dans un espace-temps express. Ce serait plutôt ça…

En tout cas, c’est assez prenant. Et beau. Les jeunes artistes sont décidément les champions du numérique, de l’image et de l’écran!  Mais ce n’est pas toujours réussi comme ici!

Pardon pour la capture d’écran. Pas de bonne qualité. Cliquez dessus quand même pour agrandir, en deux fois!

« Traces », Cellier de Clairvaux

En septembre 2016, au Cellier de Clairvaux, à Dijon, l’association M.A.R.C. a proposé une exposition intitulée « Traces », avec six artistes et la participation d’élèves des Beaux Arts de Dijon.

Je m’étais imaginée voir, à cette exposition, des gravures, des empreintes, des cicatrices, des stigmates…Bref des « traces » comme l’annonce le titre. Quelque chose qui marque, qui gratte… Qui s’enfonce dans la matière pour laisser un signe…

Pas de ça. Mais des peintures et des sculptures, dans la tradition. Bon. Le sujet « traces » étant suffisamment large et ouvert, j’ai quand même trouvé mon compte. D’un artiste à l’autre, graphismes, lignes, traits et formes, en surface ou en volume, construisent une unité à cette expo. Peut-être une impression générale de recevoir des messages d’un âge très lointain de l’humanité, passés à travers le temps, de mémoire en mémoire. En tout cas, c’est une balade très plaisante. D’autant que le souci d’esthétique est bien présent. (Les artistes sont: Rachel Seguin, Hervé Henriot, Marc Mugnier, Paule Fumoleau dit Fuggio, Jade et Bap)

J’ai bien sûr mes préférences dans cette exposition.

Je vais toujours plus volontiers vers l’épuré. Entre ceux qui en rajoutent et ceux qui en enlèvent, je choisis les deuxièmes! Par goût. Mais aussi parce que je suis convaincue qu’on en dit davantage avec le « minimum » et avec le « peu ».  On a beaucoup plus de puissance. (C’est valable pour un roman, pour un film).Jade

Ici, sous cette belle nef voûtée, j’ai aimé le langage abstrait de Jade, avec ses fragments qui s’organisent soigneusement sur la surface de la toile. J’ai aimé Fuggio, les torsions de ses sculptures et l’élan de ses graphismes. J’ai aimé les silhouettes de chevaux de Bap, comme des souvenirs au galop, et ses frises verticales architecturées en toute légèreté. J’ai aimé Marc et sa passion de la pierre dont il sublime la beauté et la force.Marc

Deux élèves des Beaux Arts présentent une excellente vidéo dont je parlerai plus tard dans ma rubrique « le choix du mois »

Cliquer sur les visuels pour agrandir, en deux fois, et voir le nom des auteurs

 

 

Pour une photographe

Pour Sophie-Caroline et son expo avec le collectif Le Grand Plongeon (2016)

Tous les sens du vent

Saisir ce qu’on ne peut pas saisir

Parce que c’est trop loin

Ou parce qu’il faudrait savoir marcher sur l’eau

Couler l’air

Flotter l’eau

Enfermer le trop léger

Attraper au vol ce qui ne dure pas

Prendre par la main le silence

Effleurer la vie

Et puis finir sans finir

Le Grand Plongeon (photos), La Source

Le collectif Le Grand Plongeon a exposé ses photographies à la Galerie La Source (Fontaine-lès-Dijon) en septembre 2016. C’était à voir…

Le Grand Plongeon, ce sont six jeunes photographes, sortis de la même école de photo de Paris. La salle du rez-de-chaussée de la Galerie résume et présente leurs travaux. Vous les retrouvez à l’étage, mais, cette fois, chacun sa salle. Donc, en bas, vous faites connaissance rapidement avec les six  personnalités. Puis, à l’étage, vous entrez de plein pied dans l’univers de chacun de ces artistes, séparément. La configuration de la Galerie permet cette intimité de chacun.

C’est une exposition de grande qualité. Ces jeunes gens savent utiliser la photo pour faire de la poésie, des portraits (dans le sens littéraire, et non dans le sens studio photo), des narrations… Ils ne donnent pas forcément la réponse aux questions que posent leurs images. Ils racontent des histoires que le visiteur écoute avec ses propres émotions, même s’il n’a pas forcément la clé. Bref, portes ouvertes à l’imaginaire, à la compréhension de l’autre, à l’invisible, à l’ineffable…

Sophie Caroline DéTé

Sophie Caroline DéTé

Et chaque travail présenté se tient, architecturé par un sujet. Appréciable!

On n’est pas dans le reportage-jounalisme, ni dans le paysage-souvenir, ni dans une simple recherche esthétique. Les photos ont  à la fois du sens et des qualités plastiques.

La mécanique des sentiments. Victoria Viennet.

La mécanique des sentiments. Victoria Viennet.

Cliquer sur les visuels pour agrandir éventuellement , en deux fois.

Le logis imaginaire, Auxerre

Auxerre, de Dijon, c’est pas tout près, mais bon, que ne ferait-on pas pour une petite expo originale et pleine d’allant? Admiration pour cette association « Mouv’Art » qui me semble bien dynamique et qui sait tenir à jour une information fournie, régulière et intéressante. Local rue Cochois (angle rue de l’Yonne, je crois), à Auxerre (s’y tiennent toujours des expos)

A l’abbaye St-Germain d’Auxerre, avait lieu, en été 2016, l’exposition  de 16 artistes de Mouv’Art, intitulée « Le logis imaginaire ».

La question était : quelles traces ont pu laisser les abbés qui ont vécu dans cette abbaye? Des artistes de l’association Mouv’Art se sont penchés sur le sujet et cette réflexion a abouti à une exposition installée justement dans le Logis de l’Abbé. Chacun a réagi à sa façon. Tout tourne autour de la religion, bien sûr.

Un parfum de dérision, de provocation ou simplement d’humour flotte sur cette expo. C’est rafraîchissant. On ne se prend pas au sérieux. L’abbé a quelques démons qui le titillent… Les chasubles suivent la mode des saisons… Les reliquaires ont de bien drôles d’allures… Ainsi que les couronnes mortuaires ou les ex-voto! … Et la statue de Saint Gullier?…Les imaginaires se sont libérés.

saint Gullier

saint Gullier

Les artistes ont puisé dans les traditions ancestrales de la culture catholique, ses croyances, ses rites, ses cérémonies, ses objets de culte etc. Soit ils ont utilisé directement des éléments anciens (missels, reliquaires, prie-dieu, lit) dans de petites installations, soit ils ont réinventé la chose en lui communiquant un peu de leur propre personnalité, telles ces bannières de procession de Marius Rech, revues et corrigées. L’un des artistes (pardon de ne pas retrouver son nom) s’est même inspiré de la Proportion Divine, et a réalisé des « solides géométriques ».

bannière (extrait)

bannière (extrait)

Autant vous dire qu’il ne faut pas passer trop vite dans cette exposition! Il y a matière à réflexion et de quoi observer sans se presser.

J’ai retenu un travail de dessins sur les gargouilles (Patricia Lamouche). Un en textiles et broderies (ou même en pâte à pain) pour des petites offrandes et objets symboliques (Sylvie Laberrigue). Un autre en textile également et broderies pour des coussins et chasubles (Danièle Merle). Des peintures sombres évocatrices de la prière (Lucile Fourchotte). Des céramiques de Catherine Ponelle (ciboires, récipients, livre). Des fantaisies grinçantes mais jubilatoires de Bernard Rousseau et de Wil-Ga etc.laberrigue

Je ne dis pas que cette exposition est d’un très haut niveau en art plastique. On pencherait plutôt pour un travail d’atelier proposé à des élèves adultes bien avancés. Mais qu’importe. Franchement, je me suis régalée. La recherche que ces artistes ont effectuée, passionnante, la créativité qu’ils ont montrée, intéressante et souvent drôle, le savoir faire qu’ils ont manifesté dans bien des cas…Tout ça valait bien les kilomètres entre Dijon et Auxerre!

cliquer sur les visuels pour agrandir et voir les noms des auteurs

 

 

Avec les élèves de Christine Delbecq

Un prof, des élèves, du matériel et des travaux en cours. Tout ça, c’est un atelier. D’art plastique ou d’autre chose. Voyons celui de Christine Delbecq, artiste plasticienne, à la MJC des Bourroches, à Dijon.

Le prof, c’est elle. Mais peut-être le mot n’est-il pas approprié. Plutôt, animatrice, accompagnatrice, confidente, guide, amie, distributrice de conseils (d’une pro)… Et sur le ruban qui attacherait tous ces mots, qui les réunirait, serait inscrit « pédagogie ».

Assise parmi ses élèves, elle est plongée dans sa tablette, son téléphone. Mais aux aguets. Elle ne perd pas un millimètre de l’avancée du travail de chacun. Répond à l’appel de Marie. Se lève. Grimpe sur une table pour mieux voir (de haut) le travail de Dany.ateliers2

Les élèves, ce jour-là, sont des adultes. A l’aise. Mais studieux. L’un bosse sans discontinuer, ne lève pas le nez de son ouvrage. L’autre contemple, médite. A la recherche du meilleur pour son travail. Hésite. Recule. Plisse les yeux. Finit par réclamer le secours de tous. Et les échanges commencent. Christine en chef d’orchestre. On pouffe de rire, on s’enthousiasme, on dévie…. On s’amuse, on se moque et, soudain, on est à nouveau sérieux. Les choses avancent.ateliers

Ici, tous se sentent respectés dans leurs différences. Dans leurs individualités. Ce qui fait qu’ici, l’air circule. On respire. L’ambiance est souple. Disciplinée, mais doucement élastique.

Le matériel...Forcément, ce sont des pots de pinceaux, des piles de papier dessin, des châssis, des petits outils divers, des livres d’art, des tubes de peinture… Ils font partie du décor. Ils participent de l’esprit créatif qui règne ici. Et finalement ils sont beaux. Pas vraiment en fouillis, car, obligés par les ateliers qui se succèdent, les participants prennent soin de ranger. Christine veille. Les boîtes et les étagères sont sagement étiquetées. Parfois, ce sont même des dessins qui illustrent les contenus: ciseaux, trombones, pinces, scotchs… Il y a aussi de la lecture placardée au mur: « une couleur n’est pas une couleur! », « ce ne sont pas des exercices que je vous donne, ce sont des défis! ». De quoi réfléchir un brin.

Les travaux en cours: suivant le sujet d’atelier, les projets les plus fous s’élaborent durant l’année.  Cette fois, la consigne était de partir d’un élément de voiture… Voilà donc les morceaux de carcasses qui arrivent à l’atelier! Qui envahissent les coins et recoins de la grande pièce du premier étage! Une portière, un capot, une aile, une roue… Et peu à peu se révèlent les sujets attachés à « la voiture ». On en fait une affaire personnelle. Les souvenirs, les émotions, les rêves, les cauchemars, les fantasmes…Ou on débouche sur les idées de règlements, de dangers, d’évasion, de vitesse… On peut aussi détourner le sujet, le retourner comme une chaussette, le faire délirer, le métamorphoser, le faire changer de registre… Tout ce qu’on veut. Pourvu que, au bout de l’aventure, naisse une réalisation plastique intéressante, vivante, riche et significative. Et qu’au passage, on ait un peu appris sur soi, sur les autres, sur le monde, sur la vie, en plus du dessin et de la couleur.

Résultat. Des boucles d’oreilles géantes sur le thème du jeu des Mille Bornes! Une plage arrière qui raconte une histoire de mauvaise dispute familiale. Un travail sur la ligne jaune, ses interdits, sa continuité… ateliers4Un autre sur le pneu, ses traces, ses empreintes. Un autre sur le rétroviseur, devenu rétro-visage. Un autre encore sur les cartes routières. Une carrosserie qui se coule dans des sujets artistiques traditionnels (nature morte ou déjeuner sur l’herbe). Un mémorial d’accident de la route. Et mille autres choses.       Le blog des ateliers de Christine Delbecq à la MJC Bourroches:

http://levoletrouge.blogspot.fr/

Cliquer sur les visuels pour agrandir, en deux fois