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Lormes, et ses espaces d’art

Enfin, (juillet 2024) nous avons fait la connaissance de ce village du Morvan dont nous entendons parler depuis un certain temps!! Lormes cherche à ne pas s’endormir au fond de sa belle campagne sauvage. Et l’art l’aide à se tenir éveillé. Pusieurs anciens commerces ont échappé à l’abandon et se sont transformés en galerie d’art.

Un peu déroutés en arrivant place de l’Hôtel de Ville, on ne repère pas tout de suite La Factory, première Galerie à s’être installée ici. Un mariage occupe l’attention de tout le monde devant la mairie! Et, quand on réalise que la fameuse Factory est devant notre nez… on s’aperçoit que ce n’est pas ouvert (malgré les horaires annoncés!)

Pauvres de nous! Une heure et demie de route depuis Dijon pour rien! Non? Cherchons ailleurs…

En face, Gisèle Didi nous accueille dans sa boutique un peu extravagante. Cette artiste photographe (35 ans de photos et de performances) expose ses oeuvres mais donne aussi à voir (et à vendre) toutes sortes d’objets et meubles vintages, drôlement kitch… Après avoir poliment refusé de participer à une séance photos (!), nous rejoignons (sur ses conseils) la maison de l’artiste Henk Slomp (hollandais).

C’est la maison elle-même qui est une oeuvre d’art! Toutes les pièces sont ouvertes au public (on suppose que les habitants se sont réfugiés dans une partie privée quelque part dans ce labyrinthe!). On déambule, surpris et touchés à chaque moment. Des engins étranges s’animent ici et là, des choses s’allument, des objets s’accumulent, des sculptures en métal occupent un mini-jardin et quelques recoins inattendus… On monte dans les étages. Tiens! Une pièce consacrée à des costumes de théâtre. On descend à la cave, une stupéfiante installation de « lanternes » sonores nous y attend. Au rez-de-chaussée, l’ancien coffre-fort (ce lieu était la banque du village!) est là, intacte, mais Henk y a mis son coup de patte (surprise!) Finalement, l’artiste nous montre son atelier où il est en train de fignoler un véhicule dingue…en vue d’une prochaine course de village!

Cette fois, La Factory est ouverte! Accueil adorable de Crétie et John. Ils sont affairés! Ils préparent le vernissage de ce soir! Nous faisons notre tour de Galerie tout seuls. Le premier étage est bien sympa: murs blancs qui mettent en valeur les peintures (une artiste d’origine brésilienne) et vieux canapés ou fauteuils pour faire une pause! Le rez-de-chaussée, au contraire, nous paraît un peu encombré (est-ce la mise en place du vernissage?) et les artistes y perdent un peu en visibilité. Quelques céramiques et de tout petits formats en peintures, gravures et broderies (intéressantes, celles-ci).

On décline la gentille invitation au vernissage et on reprend notre errance dans les rues. Nous nous arrêterons au « Quarante-Quatre » où une dame hollandaise (ils sont nombreux dans la région) nous montre son travail de récupération et assemblages. Puis c’est « L’Atelier », où plusieurs artistes féminines (parisiennes, hollandaises…) nous parlent de leur art et de leurs projets. On voit des céramiques, luxueuses sculptures-amulettes, bas-reliefs pleins d’humour, volumes suspendus, peintures… De la qualité. On nous vente une mise en oeuvre ambitieuse et généreuse d’une manufacture collaborative et solidaire à Lormes, dans un ancien moulin…Ici, ça bouillonne!

Enfin, petit passage par le « Jardin Fleuri » où l’un des maîtres du lieu, mini toutou dans les bras, nous explique patiemment leur démarche: photos, broderies… (Alessandro et Jean-Claude Stella Goldschmit).

Partout, l’ambiance est bonne, l’entente apparemment vraie et sincère entre artistes. Qu’en disent les villageois de tout ça? On a juste bu un chocolat au « Grand Café » où il était question de foot et de Tour de France!

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Isabella Ducrot, Consortium, Dijon

Dans les expositions du Consortium, rue de Longvic, à Dijon, jusqu’au 8 septembre 2024, je choisis de parler de celle de l’artiste italienne Isabella Ducrot, « Profusione ». du mercredi au dimanche 14-18h. vendredi 14-20h.

C’est interdit de toucher! (Pas vu de panneau mais je suppose!). Or, l’oeuvre de Isabella Ducrot est une ode au toucher. A la fois par ses sujets sur la tendresse et par les matériaux utilisés, papiers et textiles. On est donc en pleines contradiction et frustration!

Bon! On va faire avec! Et, de toute façon, on va aimer Isabella Ducrot!

En entrant dans les salles de son exposition du Consortium, on croit voir de grandes étoffes épinglées au mur, porteuses d’histoires. Ou des tapis, tapisseries, nappes, draps… Mais ça se révèle être du papier (japonais, la plupart), tout aussi séduisant de sensualité. Et le tissu est là aussi. On le rencontre sous forme de grands fragments collés ou cousus sur le papier.

On évoquerait volontiers des patrons géants de couturières. Beaucoup sont des kimonos. Et ici tout est matière, le support comme le motif. La matière est le sujet principal du travail d’Isabella Ducrot. Matières précieuses car souvent anciennes et venues des 4 coins du monde, collectionnées lors de ses voyages , chargées d’histoire. Elles ont déjà vécu plusieurs vies. Elles ont vielli. Tachées, décolorées, usées, rapiécées…mais toujours vivantes. Plus que jamais.

Fines soies fleuries, gros lainage « pied de coq », toiles à sac, toiles à matelas, nappes à carreaux, voiles imprimés… Et même, dit-on, des toiles qui auraient servi au peintre Raffaello (XVème)…

Quelques traits tracent des scènes de tendresse, des vases de fleurs, une théière… Minimaliste. Beaucoup de motifs de « pastilles » (comme Yayoi Kusama?). Répétitif. Un motif à l’encre revient aussi comme un leitmotiv chez Isabella Ducrot: une sorte de canevas noir et blanc, un grillage dessiné à main levée qui encadre souvent les oeuvres. Les éléments répétitifs, après les matières, semblent constituer l’essence du travail de cette artiste.

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Philippe Perez, Le Trigram, Dijon

Début mai 2024 les jeudi, vendredi et samedi, de 14 à 18h30, la Galerie Le Trigram accueillait l’exposition « Joyeux Effrois » de Philippe Perez. C’est au 29 rue Charles Dumont, à Dijon. https://letrigram.com/

Deux aspects fascinants de cet artiste sont montrés au Trigram: d’un côté, des peintures bouillonnantes comme des cauchemars qui ne se prennent pas au sérieux, et de l’autre, des peintures en série, épurées, montrant des fragments de chair en décomposition (viande, fruits ou légumes). La peinture rend belle la pourriture…!

Philippe Perez a choisi de travailler sur ce qui nous fait peur ou nous répugne.

Dans les grandes toiles vivement colorées (on aime particulièrement le grand format central, sans cadre ni vitre!) ça grouille, ça ricane…Des gueules, des grimaces édentées, des masques terrifiants, des visages cadavériques…Et puis, des feuillages, un bec de perroquet, deux baleines, du houx… Quelques fruits peut-être, quelques formes gluantes qui ondulent…Et tout ça avance vers nous, nous fixe du regard (beaucoup d’yeux!)… ça nous concerne, c’est sûr. (ci-dessous, extrait)

Philippe Perez a joué les mélis-mélos de techniques et de références, ajoutant à la peinture du crayon de couleur, du graphite, des transferts, des décalcomanies, des images Internet etc. On repère des allusions à des films, à la pop culture etc. Des apparitions, des morceaux du passé, des rêves, de l’imaginaire… Mais un fouilli maîtrisé, bien sûr, harmonieux et rendu joyeux par la couleur et l’humour.

La série des chairs, sur le mur de droite, reste dans le thème de l’expo: ce qui nous dégoûte et ce que l’on refuse de voir et de montrer, ce que l’on jette en fermant les yeux. Mais ces morceaux à peine réalistes, où l’on devine une vie finissante, une pourriture déjà avancée, sont tellement beaux! Transcendés par l’art! Posés sur le vide blanc de la toile… Tels des objets précieux! La petite goutte, qui revient comme un refrain ou une signature, de tableau en tableau, obcédante, qui n’a aucun sens (!) …est tout à fait géniale!

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Carine Olivier au Rez-de-Jardin

En avril 2024, Carine Olivier exposait « papiers, ciseaux » au Rez-de-Jardin , 11 rue d’Artois, Fontaine-lès-Dijon. vendredi 14-19h, samedi et dimanche 11-19h.

https://www.lerezdejardin-fontaine.fr/

Je n’écris pas systématiquement sur les expos du Rez-de-Jardin (une par mois!) mais, pour celle de Carine Olivier, j’ai envie de mettre quelques réflexions personnelles qui me sont venues!

Serait-elle allée chercher une moisson de fragiles fragments au coeur de ses rêves et de ses souvenirs d’enfance? Les aurait-elle décollés avec délicatesse, tels des morceaux de peau fine? Les aurait-elle ensuite replacés autre part et dans d’autres situations, avec tout autant de douceur, de soin et de respect? Et de nouvelles histoires seraient-elles nées ainsi?

Un système de décalcomanies intimes? ….!!

Certains me disent, la lipe un brin méprisante, « c’est une illustratrice ». Non, dans son travail actuel, Carine Olivier n’est pas « illustratrice ». Et même si cela était, ça ne changerait rien à l’opinion que je me suis fait d’elle. En tout cas, elle crée son propre univers et n' »illustre » pas celui des autres…

Plusieurs aspects de sa personnalité d’artiste sont intéressants:

-En amont, elle collecte. Dans des domaines bien précis et choisis. Vieux livres, papiers peints ou papiers cadeaux d’autrefois, images pieuses, cartes postales, partitions, revues de mode anciennes etc. Bref, de l’imagerie populaire, du kitsch, des chromos, du vintage…

– Voilà pour la matière première! Côté technique de création, utilisant ses talents de couturière (qu’elle tient de sa grand-mère), elle découpe aux ciseaux de brodeuse et assemble (collages) avec la minutie des meilleures « petites mains ». Méticuleuse « jusqu’à l’obcession », dit-elle. Tout est sous contrôle! Les contours, les arêtes… C’est fignolé, détaillé, raffiné. A noter que l’artiste intervient souvent sur les découpages eux-mêmes (dessins, pastel…), ou découpe ses propres dessins…

-Et, à côté de cette rigueur, un vrai délire se développe. Carine Olivier « se branche sur son subconscient » comme elle le dit elle-même. « C’est presqu’un travail automatique ». « Je n’y mets pas de sens ».

Vous devinez qu’elle aime les surréalistes!

Son monde est celui de l’enfance, des contes, des cauchemars et des rêves de petite fille. Une série de  » monstres gentils » (sur le modèle des cadavres exquis des surréalistes); une série de saynètes qu’elle nomme soit histoires sans paroles soit contes cruels et sans suite; une série (nouvelle, à suivre!) de portraits d’étranges personnages un peu hiératiques et princiers. Et tout cela se tient. Construit, organisé….et farfelu malgré tout! De quoi me plaire! (ci-dessous, « La que sabe »)

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Christine Delbecq, La Galerie, Talant

Au printemps 2024, La Galerie, espace Brassens, à Talant , proposait « D’herbes dit-elle », exposition de Christine Delbecq. Mardi, jeudi et vendredi, 14-19h. mercredi 10-13h et 14-19h et samedi 10-13h.

Elle a marché dans l’herbe. Des jours et des jours. (Pendant le fameux confinement). Elle a photographié l’herbe avec ses pieds (enfin, l’appareil photo placé au niveau des pieds). Et puis, elle a cherché à restituer tout ce qu’elle avait perçu. Un travail de mémoire un peu particulier.

Mais d’abord, il fallait digérer toutes ces expériences de couleurs, de lumières, de mouvements au rythme des marches au milieux des herbes. Toutes ces expériences de visions et de sensations différentes: Christine Delbecq s’est vue dans l’herbe, et au-dessus, et dedans, et profondément à l’intérieur, et très loin, et très près… En elle, les herbes sont devenues une matière qu’elle pouvait aplatir, allonger, rapetisser, colorier, découper, raidir, gonfler, superposer. Elle pouvait en faire des figures géométriques, des objets, des bandelettes… Un terrain d’exploration plastique infini.

Elle n’en fera pas des paysages. Aucun intérêt.

Par son geste artistique, elle transforme le réel. Son travail n’est ni abstrait ni figuratif, mais au-delà des deux.

L’exposition propose de grands panneaux au sol et au mur, des petits coussins en lévitation, des dessins extrémement fouillés, des feuillets (papier de soie) peints, des sérigraphies, des petits reliefs en bois peints, des rouleaux de papier comme sculptés, un volume fait d’une accumulation de papiers épais…Et même un extraordinaire « sismogramme » qui court sur le mur… Le tout dans une fascinante harmonie de verts et de jaunes. Cette variation autour de l’Herbe est à voir absolument, un travail plastique d’une grande artiste dijonnaise.

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Tidru et Vladimir à l’Hostellerie

A l’Hostellerie (parc de la Chartreuse, Dijon, non loin du Puits de Moïse), l’association Itinéraires Singuliers accueille deux artistes jusqu’au 26 mai, pour une exposition « Corps. Accords »: Tidru et Vladimir. Du mercredi au dimanche, 14-17h30. Une expo de grande qualité. L’Hostellerie est en train de devenir un espace important dans le monde de l’art, c’est net.

Tidru:

Dans ces grandes salles de l’Hostellerie, de timides personnages, de toutes tailles, se sont posés… Nus, raides, gênés, muets, le regard perdu… Ils sont faits de céramique ou faïence blanche (avec un engobe à base d’argile délayée). Et sur leur buste, l’artiste a peint, dessiné ou collé toutes sortes de petites scènes … Ce pourrait être des tatouages. Cependant… étrange impression d’affichages ou de projections sur le corps. Mais des projections qui pourraient venir de l’intérieur. On ne sait…

J’ai été estomaquée par cet ensemble de sculptures de Tidru. Elles ont une présence presqu’obsédante, inquiétante. Elles habitent intensément le lieu et diffusent leurs messages sans bruit…C’est efficace!

Tidru a choisi le corps humain pour s’exprimer. C’est sa page blanche. Son carnet intime. Ici un visage, là un poulet, et une architecture, et un slip, et une main, et un fauteuil, et un pied, et un groupe de personnes… Des moments de vie, parfois décrits de quelques mots. Du vécu.

J’ai aimé aussi ses boîtes blanches, derrière lesquelles se cachent sûrement ses petits personnages, sans doute craintifs, farouches ou honteux, car seules les jambes apparaissent dessous. C’est le même principe: des « illustrations » sont à voir sur une face de ces plans blancs. Des récits, des histoires…Réalisés d’un trait délicat, d’un pinceau discret.

Vladimir:

Aux côtés de Tidru, expose également l’artiste Vladimir. Le peintre occupe les murs de ses puissantes peintures. Des visages s’associent donc aux sculptures. Rongés, brisés, effacés, à peine réels, ils disent les monstres qui hantent les corps et les âmes de ceux qui souffrent.

Et Vladimir les encadre somptueusement, plusieurs fois même. Jouant avec les épaisseurs, les styles, les couleurs, les décalages et les proportions des cadres. Comme si ces visages avaient besoin d’être magnifiés et conservés grandement. Mais, en fait, le cadre prend bientôt toute la place, et le visage se fait tout petit!

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La Source! Tu me rends triste…

Que se passe-t-il?

2024 débute à la Galerie La Source (Fontaine-lès-Dijon) avec des expositions qui semblent s’être trompées de lieu. Autant ces trois dernières années m’avaient régalé d’artistes qui nous faisaient vibrer(voir en fin d’article), autant les deux premiers de cette année me déçoivent. Non pas qu’ils manquent personnellement de qualités. Je ne voudrais pas juger. Ils ne sont pas à mon goût, sans doute, je les trouve inintéressants. Mais, surtout, ils ne sont pas « à la bonne place », à mon avis.

La Source est une Galerie d’art… Je devrais malheureusement dire « était ». Aujourd’hui, c’est comme si elle avait perdu son âme.

Faut-il que je redise ce que j’attends d’un artiste et de l’art en général? Peut-être que j’en attends trop, d’ailleurs. Que je mets la barre trop haut.

Pour moi, l’art plastique, comme la musique et la poésie, sont un langage. Le seul langage qui sache exprimer les ressentis. Tout ce qui relève de l’indicible, de l’informe, de l’insensé, de l’intériorité, de l’intime, de l’invisible… (de l’in…..)

Et tout cela au travers d’oeuvres qui, elles, sont palpables et concrètes. Faites de matières diverses. Peu importe le matériau, pourvu que l’artiste le maîtrise suffisamment pour donner vie à des petites ou grandes choses qui restent habituellement très abstraites, impalpables (sentiments, croyances, symboles, émotions, souvenirs, imaginaires etc).

Et, avec un zest de bonheur esthétique… quand même! La « Beauté » , que diable!

Je crois en l’artiste! A condition qu’il me montre le réel autrement. A sa façon. Recréé, réinventé, augmenté. Pas le réel réel. Pas besoin de copié-collé. Et à condition que, à travers son oeuvre, je rencontre un humain, un chercheur, un penseur. Qu’il m’emmène quelque part. Qu’il me provoque. Qu’il m’étonne. Qu’il me secoue.

Allez! La Source! Réveille-toi! Ouvre les yeux! Reprends ta route, la bonne route!

Par contre, le public, n’a absolument pas boudé ces expos. Au contraire. Tant mieux pour la réputation du lieu municipal… Mais c’est évident que ces visiteurs n’ont malheureusement pas vu des expos d’art de qualité, sans s’en rendre compte d’ailleurs… Ce n’était que amateurisme, superficialité, banalités… J’espère que le malentendu ne va pas perdurer.

Je suis triste.

Les artistes que j’ai beaucoup appréciés en 2021, 2022, 2023 : Jean Yencesse, Nadine Morel, Pascale Serre, Samuel Erard, Claire Vanvosthuyse, Odile Massart, Jean-Philippe Jarlaud, Evelyne Lagnien, Gérard Thévignot.

Bruno Chevreau au Rez-de-Jardin

En mars 2024, l’artiste Bruno Chevreau exposait « Echecs en bois » au Rez-de-Jardin, 11 rue d’Artois, Fontaine-lès-Dijon. Vend. 14-19h , sam. et dim. 11-19h.

Même si, au premier abord, il paraît un peu bricolo et naïf, le travail de Bruno Chevreau est bel et bien celui d’un vrai artiste.

Car… (entre autres raisons!) il ne se contente pas du réel.

Le réel, il le libère de sa cage, il le déguise, change ses couleurs et ses éclairages, lui offre une nouvelle vie. Ave B. Chevreau, le réel est à la fête!

Je vous donne un exemple : à partir d’objets utilitaires en bois (brosse à massages, support de rideau, baguettes chinoises…) il réalise une scène intitulée « Tian’anmen ». Un char, piloté par une pièce majeure du jeu d’échec, s’avance vers un petit pion…Vous voyez? ça vous dit quelque chose? C’est sacrément évocateur.

Et l’expo propose plein d’autres petites installations comme celle-ci. Le jeu d’échecs devient un vaste terrain de réflexions: abus de pouvoir, totalitarisme, injustices, racisme… Il est aussi le départ vers toutes sortes d’autres références: le cheval, le fou, la tour, la reine, le roi, les pions, le noir et le blanc sont autant de sujets à traiter à part.

Le jeu d’échecs prend vie. Les pièces s’échappent, deviennent héroïnes d’autres histoires. Le summum, c’est quand, soudain, elles grandissent et se trémoussent. Magistral, au centre de la petite Galerie, trône cet extraordinaire échiquier: pièces en bronze complètement déjantées et plateau en cubes de Comblanchien! A voir pour y croire! La réalité est souvent chahutée, avec Bruno Chevreau!

L’artiste a le don de changer notre regard, osant exprimer à sa façon notre monde actuel avec dérision et humour (parfois noir! Comme son « Moulin Afrique »!). Et B. Chevreau est joueur! Jeux de mots, jeux de dames, jeux de dés, jeux de cartes…Il les mêle volontiers dans ses dessins, sculptures ou installations. Joyeux foutoir… bien rangé au Rez-de-Jardin

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Matthieu Louvrier, « Ciels », au Rez-de-Jardin

Du 12 janvier au 4 février 2024, Matthieu Louvrier a présenté son exposition « Ciels » au Rez-de-Jardin, 11 rue d’Artois, à Fontaine-lès-Dijon. Vendredi 14-19h. Samedi et dimanche 11-19h.

Il y avait longtemps que mon blog n’avait pas eu droit à une exposition au Rez-de-Jardin! Mais celle de Matthieu Louvrier me plaît tellement que je n’hésite pas! Il a osé accrocher un grand format de ses « Ciels » dans ce tout petit lieu d’art! Et c’est une bonne idée! Tout à coup, ses oeuvres prennent une autre dimension. Les petits formats paraissent grands et les grands formats immenses! Si vous aviez déjà vu « Ciels » de Matthieu Louvrier à la Galerie Brassens de Talant, au Cellier de Clairvaux ou à EVAsion des arts vous verrez ici quelque chose de différent!

Au fond de la petite salle, la toile vous happe dès l’entrée. Les couleurs et les mouvements d’un ciel infini s’élèvent (malgré le plafond!), s’enfoncent peu à peu vers un horizon inaccessible (malgré les murs!) et vous aspirent littéralement. La terre des hommes est là aussi. En dessous. Sombre. Réduite à une bande étroite. Un peu dérisoire, avec ses deux simples phares de voiture… Presque comme un dernier appel sans espoir.

Et puis, ce qui se passe actuellement au Rez-de-Jardin n’est pas seulement une exposition de peinture. Matthieu Louvrier est plasticien. Il travaille une matière et des supports. Certaines de ses toiles sont lisses, mais la surface des autres vous attire par un foisonnement deviné. Vous vous approchez.

L’artiste vous résume volontiers quelques étapes de son processus créatif. C’est un mélange de peintures et de sable, qu’il laisse sécher, puis c’est une succession de glacis, ce sont des incrustations… etc. Résultat, des effets de brillance, des reliefs rugueux, des veines, des plis, des coulures.

Vous vous éloignez. Et la surface révèle ces fameux « ciels » qui sont autant de réalités abstraites, de champs de réflexion, d’espaces de liberté. Sur bois, sur toile, sur carton recyclé… Matthieu Louvrier dit des tempêtes nuageuses, des calmes brumeux, des crépuscules songeurs…

N’oubliez pas, également, de jeter un oeil sur le petit livre de Matthieu Louvrier. Il écrit aussi. Et il fait partie du collectif Laure et Amon, maison d’édition, ça vaut le coup de s’y intéresser.

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Marine Chaleron, Mi-lieu de l’ABC, Dijon

Le Hall de l’ABC, (appelé Mi-lieu), passsage Darcy, à Dijon, a reçu la jeune diplômée de l’ENSA Dijon (juin 2023), Marine Chaleron en décembre 2023, du mardi au samedi 13-18h.

Sans rien connaître de cette jeune femme, j’entre dans le Mi-lieu de l’ABC. Et je sais tout de suite que quelque chose va passer entre les œuvres exposées et moi! ça marche! Je vois du vivant, des objets qui sont fabriqués de chair, de la matière terre qui donne tout ce qu’elle peut: des histoires anciennes, du vécu présent, de l’amour, de la sensualité, de la nostalgie, de la colère, des réussites, des échecs… Marine Chaleron a trouvé son médium! Elle écrit avec. Et on la comprend!

Sans vraie recherche esthétique (voulue, en tout cas) voilà de la céramique qui touche et qui parle… Qu’elle soit rococo émaillée, tels des coquillages géants sortis d’un conte de fée, ou qu’elle soit brute, en blocs brisés, maculée de traces fossilisées, elle est expression artistique, sincère et forte.

Marine Chaleron épuise le sujet « terre »: on devine au travers de son travail toutes les étapes, toutes les phases par lesquelles cette matière peut passer (La terre étant déjà en elle-même un livre d’Histoire! Et voilà qu’elle est utilisée par l’artiste et qu’une autre vie , d’autres vies l’attendent!). Malaxée, plissée, tordues, cuite, brûlée, cassée, refroidie, peinte, vernie, gravée…Exposée dans une Galerie d’art!

La scénographie m’a parue bien faite. Premier hall: quelques pièces sophistiquées, brillantes, faites de mille morceaux assemblés, comme de gros bijoux, avec des détails à examiner de près. Deuxième hall: des fragments de terre cuite brute, avec empreintes et traces « archéologiques », posés au mur, espacés les uns des autres. Et, entre les deux, une pièce qu’on aurait pu jeter, car ratée, éclatée, explosée… mais que l’artiste a récupérée pour lui donner sa chance d’œuvre d’art! Et c’est beau!

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