En début d’année 2012, à Dijon, le chœur de l’église Sainte-Chantal (rue Eiffel) a renouvelé son look. Je suis allée voir.
Emmanuelle Grand, artiste plasticienne et créatrice de vitraux, a réalisé deux vitraux qui sont suspendus dans le chœur. Un Christ et une colombe. Très différents des anciens vitraux, toujours en place, par leur taille, leur format et leur position, ils cohabitent cependant admirablement. L’artiste a beaucoup travaillé sur les jeux de transparence et de lumière, et c’est réussi. J’aime beaucoup aussi l’idée de suspension…
D’autre part, elle a dessiné un nouveau mobilier où sont incrustées également des pièces de vitraux. C’est beau.
Quant aux boiseries du chœur, elle les a repeintes (un travail collectif avec Christine Delbecq je crois) . L’éclairage de cet après-midi-là où je suis entrée dans l’église ne m’a pas permis de voir vraiment les marbrure, les nuances et les mouvements. Je ne les ai découverts que sur des photos regardées après-coup!
Emmanuelle Grand faisait partie du collectif Hypothèse 222 avec Christine Delbecq et Alain Steck. Ils ont participé à l’opération 50 ans d’amour, à Bombay, avec les enfants des rues et des artistes indiens.
En novembre 2012 , Zockor était à La Source (Fontaine les Dijon). Un petit délire qui bousculait la Galerie fontainoise! Rock and roll !
La Source s’est mise au pop le temps d’une expo; ça change et ça fait du bien! Lapins gros yeux, loups grandes dents, spermatozoïdes énervés, squelettes pressés, singes agités, nounours hargneux, créatures bizarroïdes fiévreuses… Tout ce petit monde défile en frises, comme sur papier peint. Répétitif à souhait. Le graphisme est réjouissant. Les couleurs souvent vives. On est dans l’univers de la BD, de la chambre d’enfant… Quoique…Certaines pièces du premier étage montrent des oeuvres (plutôt noir-et-blanc) qui affirment une attitude adulte (oui, oui).
Zockor est un artiste qui déménage, qui provoque, qui s’éclate… Et c’est revigorant. ( On évoque Combas, bien sûr. Même esprit. )
Son rire en peinture est un brin moqueur. Nos contemporains en prennent plein la figure!
J’ai beaucoup apprécié ses « cartes postales »! . « Le pays des tronches rabougries »… Par exemple! ou celui des « blablateries ». C’est tellement bien vu !!
Dans ses textes, dans ses titres, Zockor prouve qu’il manie aussi les mots, avec jeux (de mots), astuces, imagination, humour (noir), cocasseries etc.
A Chevigny-saint-Sauveur (au Polygone, fléché) , pour la troisième année , le Salon Art Actuel a proposé une palette de vingt peintres et sculpteurs. Octobre 2012.
Je me suis pris quelques bonheurs, ici ou là, en longeant les panneaux habilement placés dans cette grande salle du Polygone (qui, à priori, est assez ingrate ! Il faut savoir en tirer parti!) . J’ai eu l’impression que la sélection de Patty Prince, l’organisatrice de ce Salon, s’affinait d’année en année …
Parmi les meilleurs souvenirs de ma visite:
François Gauchet reste l’un de mes préférés (quand je pense qu’il a été refusé à la Galerie La Source, ça me fend le coeur… Reposera-t-il candidature?) Etonnante impression que la peinture mène sa main. Que la peinture le magnétise. Qu’elle dirige la danse. Qu’elle est toute puissante. Mais c’est une peinture qui sait où elle va. Et elle trace, étale, coule, applique, recouvre…avec un beau sens du rythme plastique. Chaque toile est le petit récit d’un moment quotidien.
http://francoisgauchet.over-blog.com/
Gérard Zaurin m’a laissée pantoise. Fouillé, son dessin est d’une remarquable qualité . Mais ce sont surtout les sujets traités qui m’ont intéressée au plus haut point. Avec cet artiste, on a l’impression de descendre sous la terre, à l’intérieur d’une tombe. Lambeaux de squelettes et de linceuls… S’entremêlent et se tordent des membres ou des morceaux de corps, parfois comme ficelés dans des bandelettes de momies. Mort et douleur de l’homme entortillé dans ses contraintes, ses peurs, ses ambiguïtés, ses complexes… Mais jouissance peut-être aussi.
http://zauringerard.canalblog.com/
Yves Hasselmann m’a beaucoup intéressée. Il est peintre et compositeur. Il allie musique et peinture. Il présente ici une seule oeuvre, conjuguée en variations (sa « Family ») . Quatre blocs bleus cernés d’un gros trait noir, posés en équilibre les uns sur les autres, sur fond gris et jaune. Et reproduits…Comme une phrase musicale. Un CD accompagne sa présentation.
http://www.hasselmann-peintre.com/l
Parmi les abstraction nombreuses qui fleurissent ici, je retiens celles de Igor Mysiats qui fait circuler à grande vitesse ses signes de couleur, explosant en feux d’artifice, ou rangeant son écriture-éclaboussure dans un cadre plus sage.
Celles de Guillaume Vervandier, aussi, qui fait fonctionner ses masses comme des forces qui s’affrontent ou s’unissent. Valérie Le Blévec est un peu dans le même cas.
Une remarque particulière pour le travail original d‘Anaïs Eberspecher. Pas de peinture, ici, mais un tissage de rubans adhésifs du plus bel effet.
Côté sculptures, Monique Riond est là et c’est tant mieux. On adore toujours ses personnages discrets, timides, sages, mais si présents et si vivants… Il faut parfois aller maintenant les dénicher dans leur petite maison!
Ne pas ignorer aussi Emmannuelle Seys, qui a quelques pièces fortes sur la condition humaine. Guillaume Martin n’est pas à oublier, avec ses créatures filiformes de fer ou de bois, entre végétal et humanoïde. Christelle Dupaquier est de retour avec ses petites filles espiègles et audacieuses: plaisir!
J’ai donc cité mes préférés…
Cliquez sur les visuels pour agrandir et pardon pour la pas très bonne qualité!
Une triste nouvelle m’attendait à mon retour d’un voyage lointain en octobre 2012. Une nouvelle à laquelle je m’attendais, certes….On sentait venir la chose. La galerie Nü Koza battait de l’aile…Elle ferme, ça y est…..
La formidable aventure de ce collectif d’artistes aura tenu 4 ans. Bien sûr, on nous dit que seule la galerie est morte, que le collectif continue de vivre quelque part, écartelé, nomade…Bôf. J’ai de la peine à croire.
Ainsi, Nü Köza n’aura pas résisté au départ de l’un de ses principaux piliers, le plasticien Fabien Lédé.
Les « Résurgences » du peintre Michel Tosca étaient à voir (absolument!) à la galerie La Source de Fontaine-les-Dijon,en septembre 2012.
Vous allez visiter cette exposition le nez au mur! Et vous allez scruter de (très) longs moments ces étonnantes miniatures si raffinée, comme ciselées. On pense à de fines gravures, très travaillées. Mais non. Ces petites abstractions sont faites au pastel et plume ou pointe sèche.
Dans une sobriété de teintes (mais souvent subtiles et indéfinissables, quand ce ne sont pas des gris-noir-blanc), l’artiste fait naître d’inimaginables univers. Entre photo satellite, planche de botanique, planétarium, image de microscope…..On hésite! Au coeur de ces étranges petits mondes, ça fourmille, ça tourbillonne, ça serpente, ça buissonne, ça se ramifie, ça prolifère… Des créatures embryonnaires des premiers âges terrestres, des vies de fonds d’abysses, des morceaux de planètes, des éclats de galaxies…
Michel Tosca griffe, gratte, trace, couvre, fouille… En si peu de surface, il en dit tellement! Parfois, on croit même discerner quelque écriture cunéiforme. Et on a un peu l’impression de tourner les petites pages de son grand livre, chapitre après chapitre (ses œuvres sont regroupées par diptyques, triptyques ou autres ensembles.)
pas de photos mais je vous invite à aller voir le site de M.Tosca: http://www.micheltosca.com/index.php/fr/
Pour l’inauguration de son tram, la Ville de Dijon avait demandé à l’artiste Cédric Verdure d’installer une de ses créations de Land-Art. Dans la nuit, se sont donc mises à vivre 64 sculptures de grillage, sur l’esplanade Erasme, dans le campus universitaire: Les Elfes de lumière.
Cette magie n’a duré que deux soirs de suite ( 1er et 2 septembre 2012).
Une armada de créatures éthérées, immatérielles… semble avancer vers on ne sait quel but. Fines, légères, élégantes. Voiles aux vents, elles jouent de lumières et de transparences, elles n’ont d’existence, d’ailleurs, que grâce à cela. L’éclairage coloré, qui varie sans cesse ses teintes, leur communique volume et dimensions. Étonnant.
L’autre artiste (essentiel) de cette magie est le concepteur lumière Timothé Toury. Allez voir son site: www.timothetoury.com
Il fallait bien que je me déplace pour un tel géant! Gerhard Richter au centre Pompidou, Paris, en septembre 2012.
On ne connaîtra jamais réellement l’œuvre de Richter, comme Richter ne connaîtra jamais ce qu’est réellement la peinture ou l’art. Cette expo nous écartèle entre des genres, des styles, des techniques, des visions multiples et si différentes si variées. On en ressort avec le vertige. Mais quel bonheur…
Richter cherche. Richter est un chercheur. Sûr d’une seule chose, que la peinture est « une aptitude humaine fondamentale, comme la danse ou le chant, qui ont un sens… » (s’opposant à Marcel Duchamp qui revendiquait la fin de la peinture) . Et il s’aventure dans l’univers de l’art, multipliant les expériences. Et on le suit dans son exploration grâce à cette superbe exposition de Beaubourg au-dessus des toits de Paris.
Il me semble que cette quête incessante de l’artiste allemand est une tentative d’appréhension du monde. Comment mieux comprendre la vie grâce à la peinture? A 80 ans, il continue de chercher…
Quand Richter copie en peinture des photos, avec fidélité, clichés de presse, de paysages, de famille ou même scientifiques, couleur ou noir et blanc, il porte un regard personnel sur la réalité, puis lui communique sa propre modification (ajoutant une dimension par rapport au photographe) . C’est sa façon à lui de fixer l’Histoire (ou l’histoire avec petit « h », ou les histoires intimes) en la transcendant par l’émotion, ou par des sentiments divers. (C’est le cas des photos de la mort de la bande à Baader ou les formidables photos de mère avec enfant).
Quand il se lance dans de grands formats abstraits, éclatants de matière et de couleurs, multipliant les effets et les sensations, il essaie, là aussi, d’interroger les choses de l’existence. Toutes ces étranges expériences, plus ou moins visibles, plus ou moins tangibles, que nous fait vivre la vie.
Qu’il expérimente le monochrome, la série « Nuanciers », l’émail ou la peinture sur verre, l’impression laser… etc, tout est bon pour partir à la découverte de l’ineffable!
Son travail d’artiste (il fait des installations, des sculptures) passe également par le miroir et les vitres, et, donc, par l’idée de reflets, de transparences, d’effet d’optique, de dédoublement… Passionnant. Car la réalité perd sa vérité facile et on est en questionnement incessant.
Richter…c’est super riche!
Les visuels sont des clichés d’Annie. Merci à elle. Le 1er montre une des abstractions et le deuxième une « photo-peinture ». Cliquer pour agrandir.
L’espace Bolena, rue Berbisey, à Dijon, a fermé boutique (sera remplacé par une épicerie américaine! berk!) Mais…On n’a pas tout perdu! Lisez plutôt:
D’abord, le site Espace Bolena existe toujours, et vous y retrouvez les artistes et leurs oeuvres. Tous les renseignements que vous désirez à propos d’achats, de cadeaux etc sont sur ce site
Ensuite, la plupart des peintures de Bolena sont accueillies dans le caveau de la sympathique boutique Art(e) Muse, 8-10 rue Charrue (concept store). Certaines sont directement exposées dans le magasin lui-même. Et Elise, la maîtresse des lieux, a choisi de montrer aussi le travail d’élèves des Beaux-Arts et d’autres artistes « à elle » , comme elle dit! Un lieu de création et de créateurs, donc, où art et artisanat se donnent la main.
Avant de s’envoler pour la Pologne vivre sa nouvelle vie, Fabien Lédé, l’un des fondateurs et responsables du collectif Nü Köza, avait organisé cette exposition collective dans l’ancienne église St-Philibert de Dijon en septembre 2012. Elle s’intitulait « La Clairière » et (je crois) tournait autour des vers de Baudelaire, extraits de Spleen et Idéal: « la Nature est un temple où de vivants piliers…. »
St-Philibert? C’est un lieu étrange et merveilleux. Qui a connu plusieurs vies. Cette expo est l’occasion de s’y replonger.
La seule église romane de Dijon, d’un roman tardif, du XIIème siècle. (Son clocher, lui, est gothique). Il reste quelques chapiteaux aux feuilles d’acanthe et feuilles de lys. Il y a longtemps que cette pauvre église a été désaffectée. Et elle a connu bien des avatars. Elle a même servi d’écurie et plus tard de dépôt de viande salée stockée à même le sol. Et quand, en 1975, on lui a installé un chauffage électrique par le sol (couvert de béton) , les remontées d’humidité chargées de sel ont eu raison de ses beaux et sobres piliers. Ils sont rongés. Comme si l’église avait sombré au fond de la mer… Cette pierre dévorée a quelque chose d’émouvant et de beau (je trouve!) De gros renforts en bois soutiennent certaines voûtes et arcades. Là aussi, cette architecture de béquilles confère au bâtiment une certaine étrangeté qui me plaît bien.
L’exposition? Une quinzaine d’artistes ont déposé des exemplaires de leur travail. Le lieu est vaste, son volume est imposant et, parfois, les œuvres ont un peu de peine à émerger de ce grand espace. (Je rêverais de confier l’intérieur de St-Philibert à un seul artiste: un travail in situ….Genre Monumenta réduit!!)
J’ai retenu surtout Nathalie Reba et son » full sentimental » . J’ai retrouvé là son univers équivoque déjà entrevu à une expo de dessins à la galerie Nü Köza et sur son site. Ici, un ban de poissons plats, genre soles, en verre, donnent l’impression de ramper sur le sable du sol de l’église. Comme s’ils sortaient des murs et avançaient tant bien que mal vers une sortie improbable. Avant de mourir asphyxiés… Chaque pièce est un bel objet en soi. Et l’accumulation (peut-être davantage encore aurait été bien !) donne une impression forte… Troublant.
Sinon, j’étais contente de voir deux peintures d’Alain Steck, ainsi que celles de Marc-Antoine Mazoyer. Les sculptures de Fabienne Adenis invitent toujours au voyage en son pays imaginaire. Celles de Philippe Buiatti m’étaient inconnues (il est de Metz) , elles montrent des créatures en chorégraphies qu’on verrait bien dansées au sein de la forêt.
Le reste, comme ces dessins à la tondeuse sur peau de vache, ou cette fronde qui va lancer des petites boules de papier, ou cet engin que j’ai pris pour un détecteur et mesureur d’humidité (l’artiste aurait sans doute adoré mon erreur) etc …. Non! Pas concernée. Les peintures du peintre-poète Georges Thierry, peut-être. Mais pas convaincue…
Le salon Apollon, au coeur de la ville de Dijon (entrée sous le porche, cour de Flore, Palais des Ducs) , s’est métamorphosé en un fabuleux monde de folle fiction… Il a accueilli comme chaque année pendant tout l’été, l’exposition « Dijon vu par… » Confié cette fois à Jean-Louis Thouard, illustrateur, et à Hervé Arnoul, maquettiste. Plongeon. 2012.
La scénographie en elle-même est faite pour vous happer dès l’entrée dans un puissant univers imaginaire. De grandes bâches imprimées sont suspendues le long des murs, vous faisant oublier le lieu réel. Et puis les maquettes, elles aussi sont « en l’air »… Les dessins, eux, sont à plat, mais au sommet de colonnes-socles de différentes hauteurs. (Dessins repris en grand format sur les bâches).
Et vous voilà embarqués dans un Dijon qui flotte entre deux temps, entre futur et passé. Les monuments (St Jean, le Palais des Ducs, la Poste etc) sont devenus de gigantesques vaisseaux errants dans la stratosphère. Hervé Arnoul leur a conservé leurs éléments d’architecture et de décoration, tout en les métamorphosant. C’est beau. A la fois précieux et déjanté. Riche en détails multiples (à regarder de près). Même le fameux tramway dijonnais a droit à sa maquette! Il a décollé et rentré les trains !!
Avec J.L. Thouard, les tuyauteries et les machineries ont envahi la ville. Des monuments sont chaudières ou monstres-robots. Certains habitants portent des espèces de gros masques à gaz. La ville est dans une grisaille d’apocalypse, entre poussière et fumées. On hésite entre le monde industriel du XIXème siècle (les personnages sont souvent vêtus à la mode de cette époque) et des lendemains de catastrophe nucléaire … De séduisantes jeunes créatures féminines et masculines apparaissent de-ci de-là, celles des BD ou des jeux vidéo (d’autres allusions aux comics sont à repérer aussi). Et le dessin est somptueux… On connaissait le crayon talentueux de J.L. Thouard!
Un « Dijon vu par… » qui foisonne d’idées. Univers cinématographique visionnaire à la Métropolice
Obéissant au panneau d’entrée, je n’ai malheureusement pas fait de photos. J’ai pris l’affiche en photo!!
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