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Le choix du mois, avril 17, Drawing Lab

Avec retard, mon blog étant tombé dans le coma (merci à Bastien pour l’opération chirurgicale réussie!), voici mon choix du mois d’avril 2017:

Ce mois-ci, j’ai découvert à Paris, rue Richelieu un chouette lieu qui réunit un hôtel de luxe, une boutique en son rez-de-chaussée et une salle d’expo au sous-sol. Le tout sous l’intitulé de Drawing (drawing hôtel, drawing shop et drawing lab) Cet ensemble, consacré donc au dessin, existe seulement depuis février. (cf article du « M » samedi 6 mai, p.65-67)

Je n’ai pas osé monter dans les 5 étages de l’hôtel 4 étoiles et je m’en mords les doigts aujourd’hui. Des artistes ont en effet eu carte blanche pour sols, plafonds, murs, chambres etc. Il paraît que, même si pas clients, on peut accéder à tout cela …. Je tenterai une visite gratuite une prochaine fois!

A l’accueil (sourires) on croise quelques carnets, crayons, feuilles, feutres… La boutique du tout pour dessiner. Belle qualité.

Enfin, le meilleur! Le sous-sol est un vaste espace blanc pour accueillir 4 expositions par an. Avec le but de promouvoir le dessin contemporain, de permettre les expérimentations dans ce domaine. L’artiste actuel qui s’approprie l’espace est le japonais Keita Mori. « Strings » est le titre de son installation. Jusqu’au 20 mai.

Au sol, quelques rares pièces de tissu (chemise ou couverture) semblent se détricoter et filer.  Les fils de leur existence s’étirent ensuite jusqu’aux murs et plafonds et y tracent des dessins… Ces fils de soie ou de coton occupent toutes les surfaces, réalisant comme des croquis d’architectes, des plans de bâtiments ou de cités imaginaires. Les traits sont fins et très discrets (collés ou agrafés). Pourtant, ces grands aplats donnent l’illusion de volume parfois. Et, d’ailleurs, les fils quittent la surface de temps en temps pour traverser l’espace, rejoindre le mur d’en face ou la pièce d’à côté. Il y a une circulation. Un réseau. Des connexions.K.Mori

Keita Mori donne aussi à voir une vidéo en pièce noire réalisée par Alexander Murphy.  Quatre mains tissent, tricotent, enlacent et nouent un fil. Des dessins se forment et se déforment dans l’air . Blanc sur fond noir. C’est aussi du dessin. En trois dimensions. C’est aussi la chorégraphie d’une ligne dans l’espace.video

Ce travail du trait sans crayon ni papier réinvente un peu le dessin. A suivre les prochains essais en  laboratoire!

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C

Micheline Jacques, Chartreuse

A l’espace exposition (mal indiqué, dans le parc de La Chartreuse, à Dijon, dans un bâtiment ancien à droite du puits de Moïse), Micheline Jacques a présenté ses  « Errances » l’été 2017. (mardi mercredi samedi dimanche, 13h30-17h) C’était à voir…M.Jacques3Ce qui m’intéresse dans une oeuvre d’art, c’est souvent la richesse des échos qu’elle engendre. Et, avec cette expo de Micheline Jacques, je suis gâtée. Ses étranges sculptures de textile ont à voir avec l’attente, le silence, l’enfermement, la misère, la solitude, la souffrance, la spiritualité, les traditions antiques, les cultures de contrées lointaines, les cultes funéraires     etc etc.

L’installation est très réussie. Elle a su occuper le lieu. D’une pièce à l’autre, le visiteur côtoie cette foule de personnages muets et immobiles mais terriblement présents. Ils en sont gênants. Dérangeants.M.Jacques4Prêtres? Sages? Chefs Touaregs? Shamans?  Voilà pour ceux qui trônent, assis sur des estrades, comme détenteurs d’un pouvoir ou d’une connaissance suprême.

Et puis, il y a des gisants en position verticale, des corps momifiés recroquevillés, des couples debout métamorphosés en statues, des figures (femmes?) étouffées par un voile rouge sang…M.Jacques2Le matériau utilisé par cette artiste est essentiellement le bas nylon (assorti de mousse et de divers tissus). Les créations plastiques obtenues sont à la fois belles, troublantes et « pleines » (de significations profondes que chacun pourra interpréter à sa guise). Une fois de plus, l’art textile démontre sa puissance d’expression, ses possibilités innombrables.

L’expo montre des textes de l’artiste elle-même et d’écrivains qui prolongent fort bien le travail présenté.

Je n’en dirai donc pas davantage. C’est d’ailleurs presque trop facile d’écrire  des discours là-dessus…(parfois, je préfère des oeuvres qui me laissent bouche bée et page blanche! des oeuvres qui me demandent une forte descente en moi même pour trouver les mots qui lui conviendraient! et j’aime alors cette quête qui me permet de mieux cerner l’oeuvre en question… )

Les dessins à l’encre de Chine de Micheline Jacques accompagnent admirablement l’expo. Encadrés de carton…Superbes.

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Anne Girard, Aurélien Benoist, Cellier de Clairvaux

Nouvelle exposition des « Inventifs » au Cellier de Clairvaux, à Dijon. En avril 2017. Anne Girard invitait Aurélien Benoist.

Anne Girard est un peintre littéraire! Elle affirme s’aider du dictionnaire pour peindre: « étudier les mots de mes sujets […] me permet d’affiner mon vocabulaire pictural ». Une idée qui me plaît! A partir d’une forme (feuille de bananier ou capsule, en l’occurrence, pour cette expo), elle part dans une exploration. Et je la vois bien travailler comme devant une version latine. Tourner et retourner, chercher une autre façon, s’éloigner, inventorier… Comme un écrivain, aussi, elle tente un synonyme, une métaphore, une litote… Pour dire mieux ou différemment. Pour approfondir le sujet. Pour éviter les répétitions lassantes.

Et naissent alors ses séries picturales abstraites, résultat de son investigation d’artiste.

Devant nous, sur une toile de Anne Girard, s’ouvrent des chemins de vie. Des routes à suivre. Avec obstacles, rencontres, retours, superpositions, zones vides et planes suivies de zones plus denses. Ici des blocs, là un graphisme, et puis une ligne qui dessine un cadre, un tracé nerveux de couleur, un fragment de peinture… Le chemin est encombré parfois, mais on y avance avec sérénité.GirardAlternent collages et peinture. Et c’est étrange comme, parfois, c’est la surface peinte qui donne du relief à la bande de papier collée.

Le plasticien Aurélien Benoist  a quitté la photo. Pour plus de contact avec la matière. Et, entre autre, il fait maintenant de la gravure. Un art fascinant (quand il faut « mordre la plaque »!) et qui reste souvent mystérieux pour le visiteur lambda. L’eau forte, l’aquatinte, le vernis, l’encre, le solvant, la gravure au lavis, la gravure sur bronze, la gravure sur aluminium…n’ont plus de secret pour Aurélien Benoist.

Voici donc des estampes, des typographies traditionnelles au plomb, tirées sur presse dans son atelier de Dole.

Il présente une partie de sa série « Erosion ». Pour cela il avait soumis la plaque aux conditions climatiques en extérieur. Elle était ensuite encrée puis transférée sur papier. L’idée était celle d’une impression progressive et d’une matière qui s’exprime au gré du hasard. Une idée du temps qui défile. La série « Atelier » est là aussi, des monotypes à partir de plaques de zinc, sur papier haute qualité. Et puis quelques pièces séparées, comme cette « Rage et amour » (cf visuel)BenoistSur ces feuilles au grain magnifique vivent des traits. Des traits fantômes. Des traces qui passent. Des images tronquées ou flottantes. Des labyrinthes. Des écritures parsemées. Une tache de couleur soudain. Une seule. (Le rouge, comme le sceau signature au bas d’un dessin noir et blanc chinois).

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Le studio de Anne Victor, design textile

Le studio d’Anne sent bon le tissu. Empilées dans un coin, quelques chutes d’étoffes colorées attendent une nouvelle vie, tandis que d’autres coupons patientent dans de grands tiroirs. Machine à coudre, large écran d’ordinateur et montagnes de dessins occupent les tables de travail. Une petite pièce contigüe accueille les essayages. Ambiance claire, sobre et raffinée. Toute trépidante d’enthousiasme, Anne virevolte là au milieu.

La couture. Tout a commencé par là. A 18 mois, Anne tirait déjà l’aiguille sur les genoux de sa maman couturière! « J’ai toujours réalisé mes propres vêtements, mais aussi ceux de la famille ou des amis ».  La création sur mesure, elle maîtrise. Avec broderies à l’aiguille, si vous le désirez! Dignes de la Haute Couture.

Ici, sur les mannequins, trônent d’ailleurs robe de mariée et robes de soirée, des œuvres à elle, images de sa première passion que jamais elle ne reniera. Elle continuera à coudre des habits à la demande… Même si, maintenant, elle s’est lancée  dans une autre aventure.Anne« Alors que je faisais une école de styliste par correspondance, on m’a fortement encouragée à poursuivre. Mais avec l’idée de créer moi-même mes motifs de tissus ». Ses yeux bleus pétillent!  C’était un nouveau départ!  Anne allait créer son studio design textile à Dijon et demander sa collaboration à la plasticienne Tatiana Bailly.

Voici donc que l’autre passion d’Anne se révélait: le dessin.

Si elle ouvre le dossier qu’elle intitule « Idées en vrac », surgissent des paquets de feuilles couvertes de recherches crayonnées.  Croquis rapides, assortis de notes écrites. On sent que ça bouillonne! Par exemple, à côté d’un dessin d’escargots (Anne a longtemps travaillé sur le thème de la Bourgogne) on lit « leur apporter une géométrie?-les mettre en répétition?-en motifs?- »  Et puis, voici des dessins plus aboutis, au pastel, au stylo, au feutre, au pinceau… Anne aime le graphisme à l’esprit plutôt géométrique. Studio

Mais elle se plaît aussi à détourner et à métamorphoser: telles des représentations de fibres musculaires qui deviennent tissages ou marqueteries!

A côté, là, sur la table, ce sont des dessins de Tatiana (Anne a aussi collaboré avec Anne de Angelis, illustratrice et graphiste). « A partir d’un thème choisi, chacune apporte sa pierre…On échange nos idées, nos projets, et on aboutit à un motif définitif qui sera imprimé sur tissu » explique Anne. Mais que d’étapes encore avant le résultat final!

Cette fois, Anne est devant l’ordinateur. Plutôt rare chez elle! Encore amoureuse des méthodes traditionnelles! « J’aime le manuel! Le crayon, les ciseaux, la colle! »prototype

L’ordinateur va jouer son rôle malgré tout! Pour dupliquer le dessin, le déplacer, le placer, éliminer les zones de raccord, travailler les couleurs… »J’aime obtenir des nuances, des vibrations. Sans monotonie. Avec encore l’impression du feutre qui accroche ou de l’encre qui coule! » explique Anne.Rayurescliquez sur les visuels pour agrandir, en deux fois. Et visitez le site de Anne:

http://www.annevictor.com/mode-et-accessoires/foulards/catalogue.html

Profondeurs, Itinéraires Singuliers

Le Festival Itinéraires Singuliers battait son plein en ce printemps 2017 et on ne pouvait pas tout voir! C’est toujours d’une extraordinaire richesse en expos, films, spectacles etc. Je me contente de quelques expos. Voici ce que j’ai vu.  Le thème cette année était « Profondeurs ».

1- A la Chapelle des élus, office du tourisme, Dijon, Didier Turbet propose sa « Profondeur d’âme ». Jusqu’au 23 av. 9h30-18h30, et dimanche 10-18h. Ce sont des sculptures, petits engins minutieux, faits de matériaux de récup. Mais sans lourdeur. Sans obstination ni à garder l’aspect du matériaux d’origine ni à chercher la représentation figurative (deux défauts courants chez ceux qui utilisent ainsi la récupération). Les machineries sont mi-vivantes mi-robotiques. Hésitant entre le clin d’oeil et la réflexion inquiétante. Turbet,extrait2- A l’hôtel de Vogüé, Dijon,  la Galerie Biz’art Biz’art (une association jurassienne) présente 4 artistes. Jusqu’au 23  avril. 14-19h. ts les jours.

Les dessins de Christophe St John sont de belles compositions où s’emmêlent des formes, des couleurs et des traits. Chair, peau, os, pieds, mains… apparaissent, enchevêtrés, entre vie et mort.StJohn Les sculptures de Vincent Crochard, faites de cordes et mousse polyuréthane (?) habilement travaillées pour réaliser des créatures étranges que l’on verrait bien vivre dans les grands fonds marins. Cette installation est d’un noir d’encre impressionnant. Les sculptures de M.Françoise Valois sont faites d’accumulations et d’associations (décorations funéraires, animaux empaillés, textiles…). Fascinantes oeuvres, à la frontière entre morbide, kitch (laid) et méditation.

Ma préférée est Françoise Sablons. A regarder ses « Sauvages », on évoque la magie: poupées Vaudou? Cérémonies primitives? Africaines ou amérindiennes. Ou bien on se tourne côté enfance: doudous? Dessins enfantins? Marionnettes? Ces personnages sont faits de ficelle tricotée et quelques petits accessoires discrets (telles les plumes), ils se rassemblent pour discuter activement! Drôles et vivants. Allurés et émouvants.Talant2Cliquer sur les visuels etc…

 

 

 

La peinture, au FRAC

Aux Bains du Nord (FRAC Bourgogne), 16 rue Quentin, Dijon, une exposition  s’est intitulée « La peinture en apnée ». Printemps 2017

Je trouve que le FRAC Bourgogne fait bien des gorges chaudes de son expo actuelle, dans sa communication, ses commentaires, son titre (en apnée). Certes, c’est de la peinture. Oui, et alors? Rien de vraiment extraordinaire, à mon avis. La peinture, contrairement à ce qu’on a pu dire ici ou là, n’a jamais disparu de la scène artistique. Ce n’est pas « la peinture, le retour ». Il n’y a pas, je crois, à se glorifier d’avoir réussi une expo contemporaine de peintures…A.Château

Je suis bien sûr ravie de voir des peintres exposer, mais je vous assure que je n’ai pas une seconde cessé de respirer au cours de ma visite… Intéressée, ça oui. Touchée, parfois. Dubitative ou surprise, souvent. Mais asphyxiée, non…

Ici, que des artistes dijonnais, ou qui ont un rapport intime avec Dijon. C’est sympa. Mais, là non plus, pas à s’en taper le derrière par terre.

Chacun d’eux a un rapport  à la peinture différent.  C’est ça qui est passionnant. Ils utilisent le même médium. Mais pas toujours dans le même but. Que les techniques soient diverses et variées, bon, on est habitués. Mais que la façon d’envisager la peinture ne soit pas la même… ça c’est intéressant. Il faut dire aussi que différentes générations d’artistes sont représentées. Belle confrontation.Tursic et Mille

La peinture, en tout cas, ne sert pas à décorer ou à faire joli dans mon salon. Tout le monde, ici, est d’accord. Les rôles qu’on lui fait jouer sont autres. On la torture, on la questionne, on la fait crier, se révolter…On la détourne, on la retourne, on l’exploite, on la déguise…On s’en fait une amie, une amante, une complice… On la fouille, on la teste, on la pousse dans ses derniers retranchements…Ming

Cécile Bart la met à plat sur le mur, puis, lui superpose un tableau (histoire de distances, de surfaces). Ida et Wilfried recyclent avec elle des images de magazines, de sites internet et autres photos (le dit de démontrer une certaine réalité moderne). Gentaro Murakami, grâce à elle, regarde des films d’un autre point de vue. Antoine Chateau se fait lyrique en sa compagnie. Annick David sait qu’elle a un coeur qui bat pour nous (« elle », c’est toujours la peinture! Vous suivez?). Ming l’habille de politique et d’Histoire.

A.DavidPour n’en citer que quelques uns.

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Le choix du mois (2), mars 17, B.Flachot

Deuxième choix du mois de mars! Vu dans la galerie Felli, à Paris (127 rue vieille du Temple) le travail de Bertrand Flachot. Jusqu’au 16 avril. 

Flachot3L’artiste associe photos et dessins. Il habille les clichés de lignes griffées, griffonnées…(des paysages, des chaises, des livres, des hommes, des arbres…)

Quand elles couvrent entièrement les pages de cahiers, qu’elles les noircissent totalement,  puis qu’elles s’envolent, elles pourraient bien être une écriture…

Tout cela est assez fascinant.

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Le choix du mois (1), mars 17, Archivolte

Deux choix du mois cette fois! Le premier concerne un spectacle que j’ai vu à l’Athénéum, à Dijon début mars: « Archivolte » J’ai écrit un texte en sortant. Le voici:

Une création de David Séchaud

« Archivolte » tient de la performance, du cirque, du théâtre, de l’art plastique…

Sur scène, pendant l’installation des spectateurs, David s’échauffe. Déjà, le hasard joue son rôle. David désigne au lance pierre l’activité qu’il va faire : étirements, pompes, poirier etc.

Petits sourires dans la salle.

Le spectacle débute. Vraiment ? Pas sûr. Un peu floue la frontière !

On n’a pas fini d’être dans le doute avec cette petite troupe « Placement Libre ». C’est un de ses charmes !

Bon, après une brève et très sérieuse présentation de l’équipe et du sujet, l’entraînement de David va se poursuivre. Cette fois, c’est côté mental. David entre en lui-même, guidé par François qui joue les coachs rigoureux. On ne rigole pas.

Quand même, là, les choses commencent à se craqueler tout doucement. A quelques indices, le public se met à hésiter : ce n’est peut-être pas aussi sérieux que ça !

Et la pièce s’emballe. Monte en puissance. Le public se laisse embarquer, rit, s’inquiète… Parfois ne sait plus sur quel pied danser… Etait-elle au programme cette chute de néons ? Improvisent-ils ou disent-ils leur texte ? Le personnage fait-il semblant d’avoir peur de tomber ou est-il réellement en danger ? Prévu, imprévu…Voulu, involontaire … On est sur le fil !

En fait, on assiste au travail d’une petite bande de cambrioleurs qui préparent un casse à Tokyo, au musée de l’art occidental. C’est un bâtiment qui les fascine par son architecture moderne due au Corbusier. Il s’agit de rejoindre un précieux coffre, comme dans tout bon scénario de grand cambriolage. (J’ai pensé au vieux film « Topkapi »). La drôle d’équipe étudie les moyens, les techniques, les astuces pour réussir leur affaire. Il faut aussi envisager les obstacles, les contretemps, les difficultés.

Le travail de réflexion, de recherche, de répétition se déroule sous nos yeux incrédules. On s’amuse de leurs maladresses. On s’émeut de leurs espoirs. On s’attendrit devant tant de témérité assortie de tant de naïveté. On descendrait presque sur scène pour les aider !

Une étrange structure occupe l’espace scénique depuis le début. Elle va servir d’ossature pour l’entraînement. Elle va donc être assaillie par David et ses acrobaties d’alpiniste cambrioleur. Escaladée, torturée, cassée, trouée, à moitié démolie… reconstruite…puis effondrée à nouveau. La maquette du musée ne se laisse pas violer comme ça !ARCHIVOLTE9_MarionPedenon-886x391

Tout semblait être pensé, organisé, calculé. Mais tout se déglingue.

Finalement, le rythme de la pièce s’affaisse, comme la structure, comme la lumière. Les trois jeunes baissent les bras. Plus sûrs de rien. Découragés.

David joue soudain, les yeux bandés, à essayer de stopper des billes qui roulent au sol. Au hasard, il jette les mains en avant. Encore le hasard.

Derrière lui, la structure est une silhouette de grand vaisseau échoué. Une ruine bancale. Un peu ridicule, un peu triste. Image d’un échec. Mais belle malgré tout dans cette semi-obscurité. La beauté plastique n’est pas oubliée.

Les sons ont également leur rôle dans ce spectacle. Les tests d’audition de David qui alternent doux concerto de Mozart et cacophonie assourdissante, les coups de marteau et les bruits retentissants de la démolition, les sirènes d’alarme, la musique sortie des tuyaux devenus soudain instruments à vent, le tintements des billes qui, au début, frappent les cibles et, à la fin, roulent gentiment sur le sol.

Les sons suivent le rythme de la pièce, sa construction. Et ils contribuent à son sens.

L’architecture est le sujet de base de « Archivolte » (On a même droit à un cours en vidéo d’un vrai architecte à qui il est rendu hommage, Olivier Gahinet). Et la bonne idée c’est de faire appréhender espaces et volumes par des voleurs. Une autre façon d’envisager un bâtiment. D’y pénétrer.

Et puis, il y a la façon de traiter ce sujet : par l’absurde. On rit de leurs délires à ces malheureux cambrioleurs débutants. De leurs excès. On s’apitoie devant leurs efforts totalement insensés et inutiles.

Le spectacle est riche de cette fantaisie surréaliste mais, surtout, riche des voies sur lesquelles il nous entraîne. A l’image d’une certaine catégorie d’art contemporain, nous voilà sur des références sérieuses, réelles, diverses et variées, l’architecture, le cinéma ou les casses célèbres… Matière à interrogation aussi : la vie est-elle cette structure à laquelle on s’attaque sans résultat ? Avoir des objectifs, se battre pour les atteindre, tenter de tout maîtriser ? Mais accepter aussi les aléas du destin ?

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Nastia, Galerie La Source

A Fontaine les Dijon, Galerie La Source, Nastia Mallet exposait au printemps 2017. Très beau titre de son expo: « Les arbres marchent-ils? »  Du mercredi au dimanche compris, 15h30- 18h30.

Conférence animaux

Deux raisons à ce titre de l’expo de Nastia « les arbres marchent-ils? »  -D’abord, et tout simplement, parce que l’artiste est une « fille des bois »! Elle habite à la lisière des forêts et depuis plusieurs années écoute la nature et vit au plus près d’elle. Son travail est donc inspiré par le végétal et l’animal.  -Et ensuite, cette phrase, prononcée par une aveugle de naissance, évoque cette sensation particulière que celle-ci a face à la réalité, cette façon qu’elle a de percevoir les choses différemment de nous, peut-être même cet oeil intérieur qui lui permet de connaître un réel invisible et indicible…

L’artiste aurait ces capacité-là aussi.

Nastia peint et sculpte des herbes, des arbres, des oiseaux. Ou plutôt elle les interprète (comme un musicien interprète un morceau). Son travail est tout en finesse. Un murmure. Comme ces chuchotements secrets qu’elle guette ici et là dans sa campagne conciliabuleou dans ses souvenirs. Car sa vie passée laisse également des traces dans son oeuvre. Ses rencontres  chez les amérindiens ou les asiatiques, par exemple.

Ses huiles, ses aquarelles, ses cires (cire d’horloger qu’elle parcourt de traits gravés, de petits objets incrustés et qu’elle patine ensuite) et ses sculptures ont ce raffinement, cette délicatesse et ce calme qu’on lui a toujours connus. Elle ne se résout pas à exprimer les laideurs de la vie.cire

Nastia consacre une petite pièce de la Galerie à l’écriture (1er étage). A partir de quelques textes d’une série de Mijo (ben oui c’est moi) « Les Transparentes », elle compose une scène qui ressemble à Mijo! Allusion à ses carnets de notes, à ses collections de cailloux et de sables du désert, à ses écrits…  La transparence est présente d’ailleurs dans cette expo de Nastia: ses « cités » sont « de verre »  (oui, il y a aussi la ville ici, quand même: quatre toiles au rez-de-chaussée) , l’eau, l’air et les arbres laissent le regard traverser.écriturecliquer sur les visuels pour agrandir, en deux fois

> http://www.dailymotion.com/video/x5g8w76_nastia-mallet_creation

Gao Bo , Paris

Allez! Petite visite parisienne au printemps 2017! A la Maison Européenne de la photographie, 5 rue de Fourcy, Paris, exposait le chinois Gao Bo . Le titre était « Les offrandes ». Gao Bo part de la photo, mais va bien au-delà et construit une oeuvre d’artiste plasticien.

Dès le jardin de ce musée, l’oeuvre « Les pierres aux mille visages » oblige à un premier arrêt. On est attirés, touchés par cet amoncellement de galets où apparaissent les visages de tibétains anonymes. Ils sont destinés à retourner là-bas, à être éparpillés sur les plateaux tibétains… Work in ProgressGao Bo visages

Puis, voici ces photos prises au Tibet par Gao Bo entre 85 et 95… L’artiste se les réapproprie 10 ans après, en trouve les limites, réinvente autre chose à partir d’elles, intervient dessus, en fait un matériau d’expression plastique et politique. Il les couvre de son propre sang, d’encre et de peinture. Et il va plus loin encore, il les brûle (des portraits de condamnés à mort) et garde les cendres, il les badigeonne de noir etc.

Partout sur son oeuvre l’écriture est présente. Gao Bo invente un langage inédit: idée d’une extrême difficulté à communiquer son expérience vécue au Tibet. Seule, peut-être une écriture inconnue…..Gao Bo2

Plus on avance dans l’expo, plus on découvre la photo utilisée comme installation. Les tirages très grand format sont mariés à des branchages, des masques, des petites barques, des pansements ensanglantés, des néons rouges etc. C’est successivement « Requiem », « L’immensité de la mort »… C’est fort. Très fort. Dur. Très dur.  Une oeuvre qui ressemble à un hommage à des victimes, mais aussi à un hurlement devant l’inhumanité de certaines situations dans certains pays (le sien en l’occurrence). Le travail de Gao Bo tourne autour de la destruction, de la disparition. Comment dire ça? Et comment garder des traces?Gao Bo

« Oeuvre immense, violente, humaine et lumineuse » dit François Tamisier , commissaire de cette expo. Je rajouterais : sincère et authentique (contrairement à certains de ses compatriotes artistes qui ont vite compris l’opportunité du marché de l’art).

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