Pour qu’il n’y ait pas d’embrouille (j’ai peur de n’avoir pas été bien explicite dans mon 1er post « Réflexion perso!), je précise ici certaines choses:
Il n’est pas question, dans mon esprit, de réclamer une révélation technique de l’œuvre d’art, un secret de fabrication, un mode d’emploi, un historique de la méthode! Certes, je connais les questions posées régulièrement par le public! « c’est quoi comme matière? c’est fait comment? etc ». Là n’est pas l’essentiel.
Ce que je souhaiterais ne concerne pas tous les travaux de tous les artistes. Mais certaines œuvres contemporaines gagneraient, à mon avis, à intégrer le processus qui précède le résultat, qui aboutit à ce qui nous est montré. On se fiche souvent de savoir si c’est du ciment ou de la pierre, de l’acrylique ou de la gouache. On aimerait plutôt connaître, dans certains cas, les gestes créatifs qui ont donné naissance à l’œuvre finale, l’action (répétitive ou automatique ou rapide ou lente ou difficile ou jouissive ou…que sais-je) qui a été menée en amont.
Je prends encore un exemple (le troisième depuis mon premier post!!) . Une œuvre de Christine Delbecq, qui était exposée cet été 2020 au site du « chameau » de Châteauvillain, installation qu’elle nomme je crois « Soulèvert »: de très grandes plaques suspendues, vertes, décalées légèrement entre elles, couvertes de petits lambeaux de papier blanc fixés par des milliers d’agrafes. Elle a travaillé des mois sur cette réalisation, qui a évolué, qui est partie de quelque chose pour arriver à autre chose etc. Et, entre autre, elle a parlé de ces moments où elle faisait claquer fortement l’agrafeuse pour arrêter les petits morceaux de papier dans leur velléité de s’envoler. Les faire prisonniers. Le son, le geste vif, énergique et presque agressif… Tout cela répété inlassablement. Voilà qui ne devrait pas être dissocié de l’œuvre, je pense. L’artiste plasticienne avait d’ailleurs fait, je crois, une petite vidéo de ces instants.
bonjour Mijo ;tes questions étant intéressantes, j’essaie de te répondre à peu près convenablement : tu fais bien de distinguer ce qui est de la « cuisine » d’une oeuvre et des oeuvres qui peuvent être presque le processus en elle même (ou, dit autrement, un processus qui serait l’oeuvre). Il est essentiel de faire cette distinction et difficile de la donner à voir. Pour les SoulèvErts, l’exposition – collective- de Châteauvillain n’a retenu que cette partie (essentielle il est vrai) d’une oeuvre polymorphe : l’exposition -personnelle- de l’été prochain en l’église Saint Philibert de Dijon, rétablira j’espère ce qui m’occupe, et qui est une somme des résonances multiples qui émanent, accompagnent, nourrissent, s’agrippent à, prolongent ce que j’appelle une « matrice ». Même si la cuisine existe, certains artistes produisent des oeuvres, et un ami poète avec qui j’ai travaillé, dit qu’une oeuvre qu’on doit expliquer manque peut être de quelque chose en elle même. Les spectateurs s’appuient (de plus en plus ?) sur les médiations autour des oeuvres. Pour lui chaque oeuvre -réussie- serait presque close en elle même, et valeureuse en elle même. D’autres artistes, dont je suis, sont obligés de reconnaître que leur propre intérêt (et du coup celui de leurs oeuvres ?) va à la route qui mène d’une oeuvre à l’autre, que c’est cet entre-deux (ton premier article sur mon travail a été écrit à propos d’une expo qui s’appelait « entre deux, entre plusieurs », te souviens tu ? ) qui est le point capital. Pour SoulèvErts donc, j’espère pouvoir mener à bien la présentation des éléments concordants à l’installation suspendue, qui l’éclairent ou la complexifient, puisqu’il ne s’agit pas d’expliquer mais de répertorier, de décliner, de « déplier » – ce serait le meilleur mot – ce que cette oeuvre et son mouvement me proposent. voilà l’important, pour éclairer la différence : on peut avoir envie, ou et besoin, d’une explication. Je voudrais proposer une augmentation de lectures, et l’anecdote que tu dévoiles est pertinente : la relative violence des actes qui ont fait cette oeuvre n’est pas forcément visible, comme dans la vie les dessous et les dessus des choses ne correspondent pas toujours.
voilà ce qui me vient à lecture de ton post, affaire à suivre…
bien amicalement, Christine
un grand grand merci , Christine, pour ce long commentaire! Je lis et relis!!
Mijo et Christine, merci à chacune, et bonne suite …!